L ’enquête de Guillaume Pitron apporte une réponse argumentée dans son livre L’enfer numérique. Voyage au bout d’un like (1).

Les dommages causés à l’environnement sont dus en premier lieu aux milliards de tablettes, smartphones et ordinateurs qui ouvrent la voie d’Internet.

En second lieu, aux données produites par ces outils  et enfin, au transport et au stockage de ces données dans de vastes bâtiments qui essaiment partout.

Le digital est un glouton : il consomme 10% de l’électricité produite dans le monde, et génère environ 4% des émissions de CO2 (2)… un bon gros nuage, bien réel celui-là ! Il consomme aussi des matériaux et beaucoup d’eau.

Ces consommations sont considérables. Elles représentent trois fois la consommation de ces mêmes matériaux par la France. La pollution digitale est donc colossale et c’est celle qui croît le plus rapidement.

Tout mesurer de ces technologies : ce qui en sort et ce qui y entre On entend beaucoup parler des émissions de CO2 (ce qui sort) mais bien moins de tout ce qui entre dans un produit, y compris dans le digital.

Par exemple la bague. Quelques grammes d’or pour l’objet, à comparer au sac à dos de 3 tonnes qui représente l’empreinte réelle de cette bague.

Cet exemple révèle la nécessité de prendre en compte toutes les ressources nécessaires à la fabrication d’un produit ou d’un service ce qu’on appelle le MIPS ( Material Input Per Service unit). En quelque sorte un « sac à dos écologique ».

Surprise : un ordinateur de 2kg mobilise, entre autres, 22 kg de produits chimiques, 240 kg de combustibles et 1,5 tonne d’eau claire (ratio de 881/1).

Mais tous les records sont battus par une puce électronique : 32 kg de matière (ratio de 16000/1) pour un circuit de 2 grammes. On comprend aisément que c’est la zone géographique en amont qui est concernée par la fabrication plus que la boutique de vente  !

Avec des milliards de serveurs, routeurs, bornes Wifi, le numérique fait exploser notre empreinte en matières premières.

Parlons « nuages » (ou cloud) Parmi ces empreintes matières, les immenses bâtiments (big data), infrastructures de béton et d’acier bourrées de serveurs et d’ordinateurs, gourmandes en énergie et en ressources sont au 1er rang.

Ils se multiplient au rythme du déferlement d’informations produites par le monde numérique : la collecte mondiale de toutes sortes de données exige encore des centres de… données (3) ! Or il faut de l’eau et de l’électricité pour les refroidir, pour éviter la panne générale , le bug informatique, « le noir complet ».

Ces hébergeurs doublent, triplent la conservation des données : il ne faudrait pas qu’un bug nous empêche de poster la photo de notre assiette, une vidéo de chats, un film porno… 

Et que trouve-t-on dans le sous-sol de ces bâtiments « nuages » ? On trouve des câbles, des réservoirs de plusieurs milliers de litres de fioul pour approvisionner les générateurs d’électricité en cas de panne : on est loin de la dématérialisation, des économies d’énergie, de l’indépendance de matières premières, d’un usage respectueux du monde.

Pas vraiment de quoi rêver à l’hyperconnexion promue par la 5 G, Linky, Gazpar et consorts ! Une ambition lucide dans ce domaine ? Limiter le gaspillage.

(1) Éditions Les Liens qui libèrent, Paris, 2021 (2) Ces 4% équivalent à presque le double des émissions du secteur aérien civil mondial, qui lui est constamment montré du doigt. (3) En Chine, celui de Langfang au sud de Pékin s’étend sur 600 000 m2 , soit l’équivalent de110 terrains de football.